Référencement : ceci n'est pas une science

C'est le badbuzz du moment dans la sphère SEO. Stéphane hurle des compliments à propos des experts du référencement. Et dans la blogo, les pros du milieu n'ont pas aimé ...

Et j'ai même annoncé chez l'ami Keeg que je n'allais pas suivre le mouvement de lynchage en règle. Et puis en fait, si. Ou plutôt non : je vais me pencher, avec un retard bien estival, sur une analyse à ma sauce. Après lecture du texte par lequel est venu le scandale, j'ai surtout tiqué sur un point. C'est la notion d'expert et la notion de science. Car le camarade Stéphane utilise des expressions comme expériences scientifiques en parlant des tests que l'on peut faire sur l'algorithme de Google. Un peu comme si, dans son esprit, la technologie déployée par Google n'était qu'une règle naturelle immuable que les SEO étaient incapables de comprendre. En réalité, et il le souligne pourtant, Google est une société et ils font bien ce qu'ils veulent avec la manière de classer leur index. De surcroît, si les règles étaient immuables comme il fait semblant de le suggérer, il semble que ça coûte un max de blé en ressources et en employés pour les maintenir. Si tout était si simple, à quoi ils passent leurs journées tous ces ingénieurs ? Tout cela n'a pas vraiment de sens.

Et c'est à mon avis là que vient sournoisement s'insinuer la notion d'experts. Parce que pour moi un expert est avant tout quelqu'un qui a de l'expérience. C'est à dire qu'il a passé un temps beaucoup plus important à utiliser et manipuler un certain nombre d'outils. C'est ce temps et les différentes difficultés dans la réalisation des objectifs poursuivis qui forment l'expertise. La plupart du temps le client d'un référenceur est quelqu'un qui n'a qu'un business et qu'un seul objectif commercial et stratégique. Ce client ne peut pas se permettre de consacrer des années d'expérimentations en tous genre pour le seul bénéfice d'un projet. Souvent aussi, il ne peut pas se permettre de rater sa cible et son but. Et c'est là qu'intervient ce qu'on appelle un expert, un réferenceur donc, ce qu'on appelle ici un expert SEO. C'est à dire un gars qui donne les outils pour se servir du média internet parce que derrière lui il a une expérience forte pour y avoir passé un temps et une pratique intense. Avec ce qu'on appelle des tests par l'erreur. Essayer, se tromper, recadrer, réussir. Ce n'est pas à proprement parler le protocole scientifique et pourtant beaucoup de sciences partent de ce principe de l'expérimentation. C'est souvent le seul moyen d'accès à un processus : le test en laboratoire pour vérifier une théorie. Une fois certaines lois comprises, la nature a tout de même le bon goût de ne pas muter trop souvent. Pour ce qui est de Google, c'est une autre paire de manches !

Parce que la gravité n'a pas d'enjeu commercial et que c'est ce qu'on pourrait appeler un processus naturel, c'est en effet une loi scientifique immuable. Pour le référencement, peu de règles résistent à l'épreuve du temps. Parce que la veille technologique des référenceurs consiste à trouver des failles et des moyens d'atteindre leurs objectifs. Et c'est bien là que les experts SEO ne sont pas ce que Stéphane veut bien imaginer : des gens qui apportent une idée précise du fonctionnement des moteurs de recherche ... En fait, le monsieur voudrait que les blogueurs SEO, ceux qu'il nomme les rebouteux donc, lui apportent sur un plateau d'argent la rétro-ingéniérie des algorithmes de Google ...

Car ce qui semble être l'origine de cet agacement, c'est ce présupposé. Il semblerait que notre camarade Stéphane connaisse des exemples de personnes qui déclarent connaître l'algorithme de Google, qui en font état, et qui se déclarent être des scientifiques. Des personnes qui sur le web francophone proposent leurs services en promettant de donner à leurs clients la rétro-ingéniérie des algorithmes de Google, rien que ça. Quelque part, il laisse à penser que ce serait possible. Qu'il y aurait une recette miracle pour tous les sites, qui fonctionne à tous les coups, et qui serait pensée et programmée quelque part par Google. Le fait que les sites web recourent de plus en plus à de l'User Generated Content (UGC, les commentaires sur un blog) rend caduque ce raisonnement dans la mesure où la partie sémantique est à la merci de chaque internaute. Il n'y a pas véritablement de hasard dans l'agencement organique d'un site web, mais on ne peut pas dire véritablement que sa vie numérique (création de liens, ajout d'un commentaire) soit prévisible. Et pour revenir aux accusations de gourous et autres vilaines choses de Stéphane, je ne vois vraiment pas qui ose dire maîtriser et dominer à ce point les serps.

En réalité le plus important dans cette affaire c'est véritablement l'amalgame qui est fait entre l'état des connaissances et le savoir-faire. Le référencement n'est pas une science exacte. L'auteur semble vouloir nous montrer qu'il s'en prend à des gourous qui affirmeraient le contraire. Moi qui fait probablement 500 requêtes sur Google France par jour et qui effectue une petite veille légère sur le SEO, je n'ai jamais vu de courant fort qui tendrait à essayer de cannibaliser un marché qui n'existe pas. Car oui, les entreprises ont clairement besoin de personnes qualifiées pour défendre leurs positions sur le web. Et non, le contenu ne fait pas le tout. Content is king et puis rien d'autre, ce n'est pas la réalité du commerce. Il suffit pour s'en convaincre de trouver un peu chaque jour des blogs merveilleux pour constater qu'ils ne seront jamais en haut des classements alors que leur qualité est bien supérieure aux leaders. C'est mon cas tous les jours, le web regorge de perles inconnues car elles ne sont pas mises en valeur. Enfin je conclurai un peu abruptement en lançant un pavé dans une autre mare. Celle de pas mal de community managers qui à mon humble avis sont nettement moins profitables aux entreprises qu'un bon expert SEO. Mais bon, c'est un autre débat qu'il serait bon de reprendre dans quelques années ...


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